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Un Algérien risque plus de 200 ans de prison aux USA

Un dossier judiciaire hors normes secoue actuellement les relations judiciaires entre la France et les États-Unis. Un Algérien âgé de 39 ans, dénommé Sami D., est au cœur d’une procédure d’extradition initiée par les USA, qui l’accusent d’avoir orchestré une vaste fraude électronique entre 2017 et 2020. Si la justice française accède à la demande américaine, cet Algérien encourt une peine maximale de 207 ans de prison aux USA, selon les informations révélées récemment par Le Figaro.

Les faits reprochés sont d’une rare ampleur. Cet Algérien, résidant auparavant à Dubaï, aurait mis en place un système sophistiqué de détournement de noms de domaine sur internet. Ces domaines, souvent très convoités, auraient été frauduleusement acquis avant d’être revendus à des prix vertigineux, oscillant entre 60 000 et deux millions de dollars. Les autorités américaines accusent l’Algérien d’avoir profité des failles du système de gestion des noms de domaine pour bâtir un réseau lucratif sur trois ans.

Mais l’affaire ne s’arrête pas là. D’après les États-Unis, Sami D. aurait aussi usurpé l’identité d’un juge basé en Virginie, État à l’origine du mandat d’arrêt émis en 2021. Ce point aggrave encore davantage la situation judiciaire de l’Algérien, qui s’est retrouvé sous les projecteurs dès son arrestation à Paris, à l’été 2024. Après plusieurs mois de détention provisoire, il est désormais assigné à résidence avec un bracelet électronique, en attendant que la justice française tranche sur son éventuelle extradition vers les USA.

Les charges sont lourdes : chaque fraude informatique pourrait valoir à cet Algérien une peine de 20 ans de prison. En cumulant les faits retenus par les autorités des USA, cela représente un total théorique de 200 ans. S’y ajoutent deux années pour usurpation d’identité aggravée, et cinq ans supplémentaires pour falsification de signature, d’où ce total impressionnant de 207 ans de prison pour un seul homme. Ce chiffre, s’il n’est pas forcément réaliste dans l’application finale, n’en reste pas moins symbolique de la sévérité du système judiciaire américain en matière de cybercriminalité.

Durant l’audience tenue mercredi à Paris, les magistrats français ont examiné les informations complémentaires demandées aux USA. Ces derniers ont précisé que des réductions de peine étaient possibles, notamment en cas de plaidoyer de culpabilité. L’Algérien pourrait ainsi bénéficier de 58 jours de remise par an, voire d’une hypothétique grâce présidentielle. Mais Me David-Olivier Kaminski, avocat de l’Algérien, a exprimé de sérieux doutes quant à ces options. Il a ironisé sur le fait que même en obtenant chaque année cette réduction, son client aurait encore 176 ans de prison à purger aux USA. Et quant à l’idée d’une grâce présidentielle dans une affaire de fraude numérique, il a jugé hautement improbable une intervention du président Donald Trump, si celui-ci revenait au pouvoir.

L’Algérien, de son côté, nie fermement toute implication. Il soutient être victime d’une confusion d’identité, expliquant qu’il a déjà été pris pour un autre dans une affaire similaire. Cette position est au cœur de sa défense, avec la volonté affichée de démontrer qu’il n’a jamais participé à ces détournements numériques. Me Kaminski a plaidé avec insistance contre l’extradition, soulignant que la justice française devait se montrer prudente face à une sanction aussi démesurée et incertaine. Il a également évoqué un système judiciaire américain où le sort d’un accusé peut dépendre d’un accord négocié, voire d’un facteur politique, un « loto judiciaire » selon ses propres mots.

La décision finale sur l’extradition de cet Algérien vers les USA sera rendue le 3 septembre. D’ici là, l’affaire suscite l’intérêt des médias et interroge sur la manière dont la France coopère avec la justice des États-Unis. Un Algérien accusé de cybercriminalité, une possible peine de 207 ans de prison aux USA, et des questions de fond sur l’équité judiciaire internationale : autant d’éléments qui font de ce dossier un cas emblématique à suivre de près.